Popular Tales Part 11
You’re reading novel Popular Tales Part 11 online at LightNovelFree.com. Please use the follow button to get notification about the latest chapter next time when you visit LightNovelFree.com. Use F11 button to read novel in full-screen(PC only). Drop by anytime you want to read free – fast – latest novel. It’s great if you could leave a comment, share your opinion about the new chapters, new novel with others on the internet. We’ll do our best to bring you the finest, latest novel everyday. Enjoy!
MORALITe.
_La beaute pour le s.e.xe est un rare tresor, De l'admirer jamais on ne se la.s.se; Mais ce qu'on nomme bonne grace, Est sans prix, & vaut mieux encor._
_C'est ce qu'a Cendrillon fit avoir sa Maraine, En la dressant, en l'instruisant, Tant & si bien qu'elle en fit une Reine: (Car ainsi sur ce Conte on va moralisant.)_
_Belles, ce don vaut mieux que d'estre bien coeffees, Pour engager un coeur, pour en venir a bout, La bonne grace est le vrai don des Fees; Sans elle on ne peut rien, avec elle on peut tout._
Autre Moralite.
_C'est sans doute un grand avantage, D'avoir de l'esprit, du courage, De la naissance, du bon sens, Et d'autres semblables talens, Qu'on recoit du Ciel en partage; Mais vous aurez beau les avoir, Pour vostre avancement ce seront choses vaines; Si vous n'avez, pour les faire valoir, Ou des parrains ou des maraines._
RIQUET
A LA HOUPPE.
_CONTE._
Il estoit une fois une Reine qui accoucha d'un fils, si laid & si mal fait, qu'on douta long-tems s'il avoit forme humaine. Une Fee qui se trouva a sa naissance, a.s.seura qu'il ne laisseroit pas d'estre aimable, parce qu'il auroit beaucoup d'esprit; elle ajouta meme qu'il pourroit en vertu du don qu'elle venoit de luy faire, donner autant d'esprit qu'il en auroit, a la personne qu'il aimeroit le mieux. Tout cela consola un peu la pauvre Reine, qui estoit bien affligee d'avoir mis au monde un si vilain marmot. Il est vray que cet enfant ne commenca pas pl.u.s.tost a parler, qu'il dit mille jolies choses, & qu'il avoit dans toutes ses actions je ne scay quoi de si spirituel, qu'on en estoit charme.
J'oubliois de dire qu'il vint au monde avec une pet.i.te houppe de cheveux sur la teste, ce qui fit qu'on le nomma Riquet a la houppe, car Riquet estoit le nom de la famille.
Au bout de sept ou huit ans la Reine d'un Royaume voisin accoucha de deux filles, la premiere qui vint au monde estoit plus belle que le jour: la Reine en fut si aise, qu'on apprehenda que la trop grande joye qu'elle en avoit ne luy fit mal. La meme Fee qui avoit a.s.siste a la naissance du pet.i.t Riquet a la houppe estoit presente, & pour moderer la joye de la Reine, elle luy declara que cette pet.i.te Princesse n'auroit point d'esprit, & qu'elle seroit aussi stupide qu'elle estoit belle.
Cela mortifia beaucoup la Reine; mais elle eut quelques momens apres un bien plus grand chagrin, car la seconde fille dont elle acoucha, se trouva extremement laide. Ne vous affligez point tant Madame, luy dit la Fee; vostre fille sera recompensee d'ailleurs, & elle aura tant d'esprit, qu'on ne s'appercevra presque pas qu'il luy manque de la beaute. Dieu le veuille, repondit la Reine, mais n'y auroit-il point moyen de faire avoir un peu d'esprit a l'ainee qui est si belle? Je ne puis rien pour elle, Madame, du coste de l'esprit, luy dit la Fee, mais je puis tout du coste de la beaute; & comme il n'y a rien que je ne veuille faire pour votre satisfaction, je vais luy donner pour don, de pouvoir rendre beau ou belle la personne qui luy plaira. A mesure que ces deux Princesses devinrent grandes, leurs perfections crurent aussi avec elles, & on ne parloit par tout que de la beaute de l'aisnee, & de l'esprit de la cadette. Il est vray aussi que leurs defauts augmenterent beaucoup avec l'age. La cadette enlaidissoit a veue d'oeil, & l'aisnee devenoit plus stupide de jour en jour. Ou elle ne repondoit rien a ce qu'on luy demandoit, ou elle disoit une sottise. Elle estoit avec cela si mal-adroite, qu'elle n'eust pu ranger quatre Porcelaines sur le bord d'une cheminee sans en ca.s.ser une, ny boire un verre d'eau sans en repandre la moitie sur ses habits. Quoy que la beaute soit un grand avantage dans une jeune personne, cependant la cadette l'emportoit presque toujours sur son ainee dans toutes les Compagnies. D'abord on alloit du coste de la plus belle pour la voir & pour l'admirer, mais bien tost apres, on alloit a celle qui avoit le plus d'esprit, pour luy entendre dire mille choses agreables; & on estoit estonne qu'en moins d'un quart d'heure l'ainee n'avoit plus personne aupres d'elle, & que tout le monde s'estoit range autour de la cadette. L'aisnee quoyque fort stupide, le remarqua bien, & elle eut donne sans regret toute sa beaute pour avoir la moitie de l'esprit de sa soeur. La Reine toute sage qu'elle estoit, ne put s'empecher de luy reprocher plusieurs fois sa bestise, ce qui pensa faire mourir de douleur cette pauvre Princesse. Un jour qu'elle s'estoit retiree dans un bois pour y plaindre son malheur, elle vit venir a elle un pet.i.t homme fort laid & fort desagreable, mais vestu tres-magnifiquement. C'estoit le jeune Prince Riquet a la houppe, qui estant devenu amoureux d'elle sur ses Portraits qui courroient par tout le monde, avoit quitte le Royaume de son pere pour avoir le plaisir de la voir et de luy parler. Ravi de la rencontrer ainsi toute seule, il l'aborde avec tout le respect & toute la politesse imaginable. Ayant remarque apres luy avoir fait les complimens ordinaires, qu'elle estoit fort melancolique, il luy dit; je ne comprens point, Madame, comment une personne aussi belle que vous l'estes, peut estre aussi triste que vous le paroissez; car quoyque je puisse me vanter d'avoir veu une infinite de belles personnes, je puis dire que je n'en ay jamais vu dont la beaute aproche de la vostre. Cela vous plaist a dire, Monsieur, luy repondit la Princesse, & en demeure la. La beaute, reprit Riquet a la houppe, est un si grand avantage qu'il doit tenir lieu de tout le reste; & quand on le possede, je ne voy pas qu'il y ait rien qui puisse nous affliger beaucoup. J'aimerois mieux, dit la Princesse, estre aussi laide que vous & avoir de l'esprit, que d'avoir de la beaute comme j'en ay, & estre beste autant que je le suis. Il n'y a rien, Madame, qui marque davantage qu'on a de l'esprit, que de croire n'en pas avoir, & il est de la nature de ce bien la, que plus on en a, plus on croit en manquer. Je ne scay pas cela, dit la Princesse, mais je scay bien que je suis fort beste, & c'est de la que vient le chagrin qui me tue. Si ce n'est que cela, Madame, qui vous afflige, je puis ais.e.m.e.nt mettre fin a vostre douleur. Et comment ferez-vous, dit la Princesse; J'ay le pouvoir, Madame, dit Riquet a la houppe, de donner de l'esprit autant qu'on en scauroit avoir a la personne que je dois aimer le plus; & comme vous estes, Madame, cette personne, il ne tiendra qu'a vous que vous n'ayez autant d'esprit qu'on en peut avoir, pourvu que vous vouliez bien m'epouser. La Princesse demeura toute interdite, & ne repondit rien. Je voy, reprit Riquet a la houppe, que cette proposition vous fait de la peine, & je ne m'en estonne pas; mais je vous donne un an tout entier pour vous y resoudre. La Princesse avoit si peu d'esprit, & en meme temps une si grande envie d'en avoir, qu'elle s'imagina que la fin de cette annee ne viendroit jamais; de sorte qu'elle accepta la proposition qui luy estoit faite. Elle n'eut pas pl.u.s.tost promis a Riquet a la houppe, qu'elle l'epouseroit dans un an a pareil jour, qu'elle se sent.i.t tout autre qu'elle n'estoit auparavant; elle se trouva une facilite incroyable a dire tout ce qui luy plaisoit, & a le dire d'une maniere fine, aisee et naturelle: elle commenca des ce moment une conversation galante, & soutenue avec Riquet a la houppe, ou elle brilla d'une telle force, que Riquet a la houppe crut luy avoir donne plus d'esprit qu'il ne s'en estoit reserve pour luy-meme. Quand elle fut retournee au Palais, toute la Cour ne scavoit que penser d'un changement si subit & si extraordinaire, car autant qu'on luy avoit ouy dire d'impertinences auparavant, autant luy entendoit-on dire des choses bien sensees & infiniment spirituelles. Toute la Cour en eut une joye qui ne se peut imaginer, il n'y eut que sa cadette qui n'en fut pas bien aise, parce que n'ayant plus sur son ainee l'avantage de l'esprit, elle ne paroissoit plus aupres d'elle qu'une Guenon fort desagreable. Le Roi se conduisoit par ses avis, & alloit meme quelquefois tenir le Conseil dans son Appartement. Le bruit de ce changement s'estant repandu, tous les jeunes Princes des Royaumes voisins firent leurs efforts pour s'en faire aimer, & presque tous la demanderent en Mariage; mais elle n'en trouvoit point qui eust a.s.sez d'esprit, & elle les ecoutoit tous sans s'engager a pas un d'eux. Cependant il en vint un si puissant, si riche, si spirituel & si bien fait, qu'elle ne pust s'empecher d'avoir de la bonne volonte pour luy. Son pere s'en estant apperceu, luy dit qu'il la faisoit la maistresse sur le choix d'un Epoux, & qu'elle n'avoit qu'a se declarer. Comme plus on a d'esprit, & plus on a de peine a prendre une ferme resolution sur cette affaire, elle demanda, apres avoir remercie son pere, qu'il luy donnast du temps pour y penser. Elle alla par hazard se promener dans le meme bois ou elle avoit trouve Riquet a la houppe, pour rever plus commodement a ce qu'elle avoit a faire. Dans le tems qu'elle se promenoit, revant profondement, elle entendit un bruit sourd sous ses pieds, comme de plusieurs personnes qui vont & viennent & qui agissent. Ayant preste l'oreille plus attentivement, elle out que l'un disoit apporte-moy cette marmite, l'autre donne-moy cette chaudiere, l'autre mets du bois dans ce feu. La terre s'ouvrit dans le meme temps, & elle vit sous ses pieds comme une grande Cuisine pleine de Cuisiniers, de Marmitons & de toutes sortes d'Officiers necessaires pour faire un festin magnifique. Il en sort.i.t une bande de vingt ou trente Rotisseurs, qui allerent se camper dans une allee du bois autour d'une table fort longue, & qui tous, la lardoire a la main, & la queue de Renard sur l'oreille, se mirent a travailler en cadence au son d'une Chanson harmonieuse. La Princesse estonnee de ce spectacle, leur demanda pour qui ils travailloient. C'est, Madame, luy repondit le plus apparent de la bande, pour le Prince Riquet a la houppe, dont les nopces se feront demain. La Princesse encore plus surprise qu'elle ne l'avoit este, & se resouvenant tout a coup qu'il y avoit un an qu'a pareil jour, elle avoit promis d'epouser le Prince Riquet a la houppe, elle pensa tomber de son haut. Ce qui faisoit qu'elle ne s'en souvenoit pas, c'est que quand elle fit cette promesse, elle estoit une bete, & qu'en prenant le nouvel esprit que le Prince luy avoit donne, elle avoit oublie toutes ses sottises. Elle n'eut pas fait trente pas en continuant sa promenade, que Riquet a la houppe se presenta a elle, brave, magnifique, & comme un Prince qui va se marier. Vous me voyez, dit-il, Madame, exact a tenir ma parole, & je ne doute point que vous ne veniez ici pour executer la vostre, & me rendre, en me donnant la main, le plus heureux de tous les hommes. Je vous avoueray franchement, repondit la Princesse, que je n'ay pas encore pris ma resolution la-dessus, & que je ne croy pas pouvoir jamais la prendre telle que vous la souhaitez. Vous m'etonnez, Madame, lui dit Riquet a la houppe: Je le croy, dit la Princesse, & a.s.surement si j'avois affaire a un brutal, a un homme sans esprit, je me trouverais bien embara.s.see. Une Princesse n'a que sa parole, me diroit-il, & il faut que vous m'epousiez, puisque vous me l'avez promis; mais comme celuy a qui je parle est l'homme du monde qui a le plus d'esprit, je suis seure qu'il entendra raison. Vous scavez que quand je n'estois qu'une beste, je ne pouvois neanmoins me resoudre a vous epouser, comment voulez-vous qu'ayant l'esprit que vous m'avez donne, qui me rend encore plus difficile en gens que je n'estois, je prenne aujourd'huy une resolution que je n'ay pu prendre dans ce temps-la. Si vous pensiez tout de bon a m'epouser, vous avez eu grand tort de m'oster ma bestise, & de me faire voir plus clair que je ne voyois. Si un homme sans esprit, repondit Riquet a la houppe, serait bien receu, comme vous venez de le dire, a vous reprocher vostre manque de parole, pourquoi voulez-vous, Madame, que je n'en use pas de mesme, dans une chose ou il y va de tout le bonheur de ma vie; est-il raisonnable que les personnes qui ont de l'esprit, soient d'une pire condition que ceux qui n'en ont pas; le pouvez-vous pretendre, vous qui en avez tant, & qui avez tant souhaite d'en avoir? mais venons au fait, s'il vous plaist: A la reserve de ma laideur, y a-t'il quelque chose en moy qui vous deplaise, estes-vous malcontente de ma naissance, de mon esprit, de mon humeur, & de mes manieres? Nullement, repondit la Princesse, j'aime en vous tout ce que vous venez de me dire. Si cela est ainsi, reprit Riquet a la houppe, je vais estre heureux, puisque vous pouvez me rendre le plus aimable de tous les hommes. Comment cela se peut-il faire? luy dit la Princesse.
Cela se fera, repondit Riquet a la houppe, si vous m'aimez a.s.sez pour souhaiter que cela soit; & afin, Madame, que vous n'en doutiez pas, scachez que la meme Fee qui au jour de ma naissance me fit le don de pouvoir rendre spirituelle la personne qu'il me plairoit, vous a aussi fait le don de pouvoir rendre beau celuy que vous aimerez, & a qui vous voudrez bien faire cette faveur. Si la chose est ainsi, dit la Princesse, je souhaite de tout mon coeur que vous deveniez le Prince du monde le plus beau & le plus aimable; & je vous en fais le don autant qu'il est en moy. La Princesse n'eut pas pl.u.s.tost p.r.o.nonce ces paroles, que Riquet a la houppe parut a ses yeux, l'homme du monde le plus beau, le mieux fait, & le plus aimable quelle eust jamais vu. Quelques-uns a.s.seurent que ce ne furent point les charmes de la Fee qui opererent, mais que l'amour seul fit cette Metamorphose. Ils disent que la Princesse ayant fait reflexion sur la perseverance de son Amant, sur sa discretion, & sur toutes les bonnes qualitez de son ame & de son esprit, ne vit plus la difformite de son corps, ny la laideur de son visage, que sa bosse ne luy sembla plus que le bon air d'un homme qui fait le gros dos; & qu'au lieu que jusqu'a lors elle l'avoit vu boiter effroyablement, elle ne luy trouva plus qu'un certain air penche qui la charmoit; ils disent encore que ses yeux qui estoient louches, ne luy en parurent que plus brillans, que leur dereglement pa.s.sa dans son esprit pour la marque d'un violent excez d'amour, & qu'enfin son gros nez rouge eut pour elle quelque chose de Martial et d'Heroque. Quoyqu'il en soit, la Princesse luy promit sur le champ de l'epouser, pourvu qu'il en obtint le consentement du Roy son Pere. Le Roy ayant scu que sa fille avoit beaucoup d'estime pour Riquet a la houppe, qu'il connoissoit d'ailleurs pour un Prince tres-spirituel & tres-sage, le receut avec plaisir pour son gendre. Des le lendemain les nopces furent faites, ainsi que Riquet a la houppe l'avoit prevu, & selon les ordres qu'il en avoit donnez longtemps auparavant.
MORALITe.
_Ce que l'on voit dans cet ecrit, Est moins un conte en l'air que la verite meme; Tout est beau dans ce que l'on aime, Tout ce qu'on aime a de l'esprit._
Autre Moralite.
_Dans un objet ou la Nature, Aura mis de beaux traits, & la vive peinture D'un teint ou jamais l'Art ne scauroit arriver, Tous ces dons pourront moins pour rendre un coeur sensible, Qu'un seul agrement invisible, Que l'Amour y fera trouver._
LE PEt.i.t
POUCET
_CONTE._
Il estoit une fois un Bucheron & une Bucheronne, qui avoient sept enfans tous Garcons. L'aine n'avoit que dix ans, & le plus jeune n'en avoit que sept. On s'estonnera que le Bucheron ait eu tant d'enfans en si peu de temps; mais c'est que sa femme alloit viste en besongne, & n'en faisoit pas moins que deux a la fois. Ils estoient fort pauvres, & leur sept enfans les incommodoient beaucoup, parce qu'aucun d'eux ne pouvoit encore gagner sa vie. Ce qui les chagrinoit encore, c'est que le plus jeune estoit fort delicat, & ne disoit mot, prenant pour bestise, ce qui estoit une marque de la bonte de son esprit: il estoit fort pet.i.t, & quand il vint au monde il n'estoit gueres plus gros que le pouce, ce qui fit que l'on l'appella le pet.i.t Poucet. Ce pauvre enfant estoit le souffre douleurs de la maison, & on luy donnoit toujours le tort.
Cependant il estoit le plus fin, & le plus avise de tous ses freres, & s'il parloit peu, il ecoutait beaucoup. Il vint une annee tres-facheuse, & la famine fut si grande, que ces pauvres gens resolurent de se deffaire de leurs enfans. Un soir que ces enfans estoient couchez, & que le Bucheron estoit aupres du feu avec sa femme, il luy dit, le coeur serre de douleur? Tu vois bien que nous ne pouvons plus nourir nos enfans: je ne scaurois les voir mourir de faim devant mes yeux, & je suis resolu de les mener perdre demain au bois, ce qui sera bien aise, car tandis qu'ils s'amuseront a f.a.goter, nous n'avons qu'a nous enfuir sans qu'ils nous voyent. Ah! s'ecria la Bucheronne, pourrois-tu bien toy-meme mener perdre tes enfans? Son mary avoit beau luy representer leur grande pauvrete, elle ne pouvoit y consentir; elle estoit pauvre, mais elle estoit leur mere: Cependant ayant considere quelle douleur ce luy seroit de les voir mourir de faim, elle y consent.i.t, & alla se coucher en pleurant. Le pet.i.t Poucet ouit tout ce qu'ils dirent, car ayant entendu de dedans son lit qu'ils parloient d'affaires, il s'estoit leve doucement, & s'estoit glisse sous l'escabelle de son pere pour les ecouter sans estre vu. Il alla se recoucher & ne dormit point le reste de la nuit, songeant a ce qu'il avoit a faire. Il se leva de bon matin, & alla au bord d'un ruisseau, ou il emplit ses poches de pet.i.ts cailloux blancs, & ensuite revint a la maison. On part.i.t, & le pet.i.t Poucet ne decouvrit rien de tout ce qu'il scavoit a ses freres. Ils allerent dans une forest fort epaisse, ou a dix pas de distance on ne se voyoit pas l'un l'autre. Le Bucheron se mit a couper du bois & ses enfans a rama.s.ser les broutilles pour faire des f.a.gots. Le pere & la mere les voyant ocupez a travailler, s'eloignerent d'eux insensiblement, & puis s'enfuirent tout a coup par un pet.i.t sentier detourne. Lors que ces enfans se virent seuls, ils se mirent a crier & a pleurer de toute leur force. Le pet.i.t Poucet les laissoit crier, scachant bien par ou il reviendroit a la maison; car en marchant il avoit laisse tomber le long du chemin les pet.i.ts cailloux blancs qu'il avoit dans ses poches. Il leur dit donc, ne craignez-point mes freres, mon Pere & ma Mere nous ont laissez icy, mais je vous remeneray bien au logis, suivez-moy seulement, ils le suivirent, & il les mena jusqu'a leur maison par le meme chemin qu'ils estoient venus dans la forest. Ils n'oserent d'abord entrer, mais ils se mirent tous contre la porte pour ecouter ce que disoient leur Pere & leur Mere.
Dans le moment que le Bucheron & la Bucheronne arriverent chez eux, le Seigneur du Village leur envoya dix ecus qu'il leur devoit il y avoit longtems, & dont ils n'esperoient plus rien: Cela leur redonna la vie, car les pauvres gens mouroient de faim. Le Bucheron envoya sur l'heure sa femme a la Boucherie. Comme il y avoit long-temps qu'elle n'avoit mange, elle acheta trois fois plus de viande qu'il n'en falloit pour le souper de deux personnes. Lors qu'ils furent ra.s.sa.s.siez; la Bucheronne dit, helas, ou sont maintenant nos pauvres enfans, ils feroient bonne chere de ce qui nous reste la: Mais aussi Guillaume, c'est toy qui les as voulu perdre, j'avois bien dit que nous nous en repentirions, que font-ils maintenant dans cette Forest? Helas! mon Dieu, les Loups les ont peut etre deja mangez; tu es bien inhumain d'avoir perdu ainsi tes enfans. Le Bucheron s'impatienta a la fin, car elle redit plus de vingt fois qu'ils s'en repentiroient & qu'elle l'avoit bien dit. Il la menaca de la battre si elle ne se taisoit. Ce n'est pas que le Bucheron ne fust peut-estre encore plus fache que sa femme, mais c'est qu'elle luy rompoit la teste, & qu'il estoit de l'humeur de beaucoup d'autres gens, qui ayment fort les femmes qui disent bien, mais qui trouvent tres importunes celles qui ont toujours bien dit. La Bucheronne estoit toute en pleurs? Helas! ou sont maintenant mes enfans, mes pauvres enfans?
Elle le dit une fois si haut que les enfans qui etoient a la porte l'ayant entendu, se mirent a crier tous ensemble, nous voyla, nous voyla. Elle courut viste leur ouvrir la porte, & leur dit en les embra.s.sant, que je suis aise de vous revoir, mes chers enfans, vous estes bien las, & vous avez bien faim; & toy Pierrot comme te voyla crotte, vien que je te debarbouille. Ce Pierrot estoit son fils aine qu'elle aimoit plus que tous les autres, parce qu'il estoit un peu rousseau, & qu'elle estoit un peu rousse. Ils se mirent a Table, & mangerent d'un apet.i.t qui faisoit plaisir au Pere & a la Mere, a qui ils racontoient la peur qu'ils avoient eue dans la Forest en parlant presque toujours tous ensemble: Ces bonnes gens etoient ravis de revoir leurs enfans avec eux, & cette joye dura tant que les dix ecus durerent; mais lors que l'argent fut depense ils retomberent dans leur premier chagrin; & resolurent de les perdre encore, & pour ne pas manquer leur coup, de les mener bien plus loin que la premiere fois. Ils ne purent parler de cela si secrettement qu'ils ne fussent entendus par le pet.i.t Poucet, qui fit son compte de sortir d'affaire comme il avoit deja fait; mais quoy qu'il se fut leve de bon matin pour aller rama.s.ser des pet.i.ts cailloux, il ne put en venir a bout, car il trouva la porte de la maison fermee a double tour. Il ne scavoit que faire lors que la Bucheronne leur ayant donne a chacun un morceau de pain pour leur dejeune, il songea qu'il pourroit se servir de son pain au lieu de cailloux en le jettant par miettes le long des chemins ou ils pa.s.seroient, il le serra donc dans sa poche. Le Pere & la Mere les menerent dans l'endroit de la Forest le plus epais & le plus obscur, & des qu'ils y furent ils gagnerent un faux fuyant & les laisserent la. Le pet.i.t Poucet ne s'en chagrina pas beaucoup, parce qu'il croyait retrouver ais.e.m.e.nt son chemin par le moyen de son pain qu'il avoit seme par tout ou il avoit pa.s.se; mais il fut bien supris lors qu'il ne put en retrouver une seule miette, les Oiseaux etoient venus qui avoient tout mange. Les voyla donc bien affliges, car plus ils marchoient plus ils s'egaroient, & s'enfoncoient dans la Forest. La nuit vint, & il s'eleva un grand vent qui leur faisoit des peurs epouventables. Ils croyoient n'entendre de tous cotes que les heurlemens de Loups qui venoient a eux pour les manger. Ils n'osoient presque se parler ny tourner la teste. Il survint une grosse pluye qui les perca jusqu'aux os; ils glissoient a chaque pas & tomboient dans la boue, d'ou ils se relevoient tout crottes, ne scachant que faire de leurs mains. Le pet.i.t Poucet grimpa au haut d'un Arbre pour voir s'il ne decouvriroit rien; ayant tourne la teste de tous costes, il vit une pet.i.te lueur comme d'une chandelle, mais qui estoit bien loin par de-la la Forest. Il descendit de l'arbre; & lors qu'il fut a terre il ne vit plus rien; cela le desola. Cependant ayant marche quelque temps avec ses freres du coste qu'il avoit veu la lumiere, il la revit en sortant du Bois. Ils arriverent enfin a la maison ou estoit cette chandelle, non sans bien des frayeurs, car souvent ils la perdoient de veue, ce qui leur arrivoit toutes les fois qu'ils descendoient dans quelques fonds.
Ils heurterent a la porte, & une bonne femme vint leur ouvrir. Elle leur demanda ce qu'ils vouloient, le pet.i.t Poucet luy dit, qu'ils etoient de pauvres enfans qui s'estoient perdus dans la Forest, & qui demandoient a coucher par charite. Cette femme les voyant tous si jolis se mit a pleurer, & leur dit, helas! mes pauvres enfans, ou estes vous venus?
scavez vous bien que c'est icy la maison d'un Ogre qui mange les pet.i.ts enfans. Helas! Madame, luy repondit le pet.i.t Poucet, qui trembloit de toute sa force aussi bien que ses freres; que ferons-nous? Il est bien seur que les Loups de la Forest ne manqueront pas de nous manger cette nuit, si vous ne voulez pas nous retirer chez vous. Et cela etant nous aimons mieux que ce soit Monsieur qui nous mange, peut-estre qu'il aura pitie de nous, si vous voulez bien l'en prier. La femme de l'Ogre qui crut qu'elle pourroit les cacher a son mary jusqu'au lendemain matin, les laissa entrer & les mena se chauffer aupres d'un bon feu, car il y avoit un Mouton tout entier a la broche pour le soupe de l'Ogre. Comme ils commencoient a se chauffer ils entendirent heurter trois ou quartre grands coups a la porte, c'estoit l'Ogre qui revenoit. Aussi-tost sa femme les fit cacher sous le lit, & alla ouvrir la porte. L'Ogre demanda d'abord si le soupe estoit prest, & si on avoit tire du vin, & aussi-tost se mit a table. Le Mouton estoit encore tout sanglant, mais il ne luy en sembla que meilleur. Il fleuroit a droite & a gauche, disant qu'il sentoit la chair fraiche. Il faut luy dit sa femme, que ce soit ce Veau que je viens d'habiller que vous sentez. Je sens la chair fraiche, te dis-je encore une fois, reprit l'Ogre, en regardant sa femme de travers, & il y a icy quelque chose que je n'entens pas; en disant ces mots, il se leva de Table, & alla droit au lit. Ah, dit il, voila donc comme tu veux me tromper maudite femme, je ne scais a quoy il tient que je ne te mange aussi; bien t'en prend d'etre une vieille beste.
Voila du Gibier qui me vient bien a propos pour traiter trois Ogres de mes amis qui doivent me venir voir ces jours icy. Il les tira de dessous le lit l'un apres l'autre. Ces pauvres enfans se mirent a genoux en luy demandant pardon, mais ils avoient a faire au plus cruel de tous les Ogres, qui bien loin d'avoir de la pitie les devoroit deja des yeux, & disoit a sa femme que ce seroit la de friands morceaux lors qu'elle leur auroit fait une bonne sausse. Il alla prendre un grand Couteau, & en approchant de ces pauvres enfans, il l'aiguisoit sur une longue pierre qu'il tenoit a sa main gauche. Il en avoit deja empoigne un, lorsque sa femme luy dit, que voulez vous faire a l'heure qu'il est, n'aurez-vous pas a.s.sez de temps demain matin? Tay-toy, reprit l'Ogre, ils en seront plus mortifies. Mais vous avez encore la tant de viande, reprit sa femme, voila un Veau, deux Moutons & la moitie d'un Cochon. Tu as raison dit l'Ogre, donne leur bien a souper affin qu'il ne maigrissent pas, & va les mener coucher. La bonne femme fut ravie de joye, & leur porta bien a souper, mais ils ne purent manger tant ils etoient saisis de peur. Pour l'Ogre il se remit a boire, ravi d'avoir de quoy si bien regaler ses Amis. Il but une douzaine de coups plus qu'a l'ordinaire, ce qui luy donna un peu dans la teste, & l'obligea de s'aller coucher.
L'Ogre avoit sept filles qui n'etoient encore que des enfans. Ces pet.i.tes Ogresses avoient toutes le teint fort beau, parce qu'elles mangeoient de la chair fraiche comme leur pere; mais elles avoient de pet.i.ts yeux gris & tout ronds, le nez crochu & une fort grande bouche avec de longues dents fort aigues & fort eloignees l'une de l'autre.
Elles n'estoient pas encore fort mechantes; mais elles promettoient beaucoup, car elles mordoient deja les pet.i.ts enfans pour en succer le sang. On les avoit fait coucher de bonne heure, & elles estoient toutes sept dans un grand lit, ayant chacune une Couronne d'or sur la teste. Il y avoit dans la meme Chambre un autre lit de la meme grandeur; ce fut dans ce lit que la femme de l'Ogre mit coucher les sept pet.i.ts garcons, apres quoi elle s'alla coucher aupres de son mary. Le pet.i.t Poucet qui avoit remarque que les filles de l'Ogre avoient des Couronnes d'or sur la teste, & qui craignoit qu'il ne prit a l'Ogre quelques remords de ne les avoir pas egorges des le soir meme, se leva vers le milieu de la nuit, & prenant les bonnets de ses freres & le sien, il alla tout doucement les mettre sur la teste des sept filles de l'Ogre apres leur avoir oste leurs Couronnes d'or qu'il mit sur la teste de ses freres & sur la sienne, afin que l'Ogre les prit pour ses filles, & ses filles pour les garcons qu'il vouloit egorger. La chose reussit comme il l'avoit pense; car l'Ogre s'etant eveille sur le minuit, eut regret d'avoir differe au lendemain ce qu'il pouvoit executer la veille, il se jetta donc brusquement hors du lit, & prenant son grand Couteau, allons voir, dit il, comment se portent nos pet.i.ts drolles, n'en faisons pas a deux fois; il monta donc a tatons a la Chambre de ses filles & s'approcha du lit ou etoient les pet.i.ts garcons, qui dormoient tous excepte le pet.i.t Poucet, qui eut bien peur lors qu'il sent.i.t la main de l'Ogre qui luy tastoit la teste, comme il avoit taste celle de tous ses freres. L'Ogre qui sent.i.t les Couronnes d'or; vrayment, dit il, j'allois faire la un bel ouvrage, je voy bien que je bus trop hier au soir. Il alla ensuite au lit de ses filles ou ayant senti les pet.i.ts bonnets des garcons. Ah, les voila, dit-il nos gaillards? Travaillons hardiment; en disant ses mots, il coupa sans balancer la gorge a ses sept filles. Fort content de cette expedition, il alla se recoucher aupres de sa femme.
Aussi-tost que le pet.i.t Poucet entendit ronfler l'Ogre, il reveilla ses freres, & leur dit de s'habiller promptement & de le suivre. Ils descendirent doucement dans le Jardin, & sauterent par dessus les murailles. Ils coururent presque toute la nuit, toujours en tremblant & sans scavoir ou ils alloient. L'Ogre s'estant eveille dit a sa femme, va-t'en la haut habiller ces pet.i.ts droles d'hier au soir; l'Ogresse fut fort estonnee de la bonte de son mary, ne se doutant point de la maniere qu'il entendoit qu'elle les habillast, & croyant qu'il luy ordonnoit de les aller vestir, elle monta en haut ou elle fut bien surprise lorsqu'elle apercut ses sept filles egorgees & nageant dans leur sang.
Elle commenca par s'evanouir (car c'est le premier expedient que trouvent presque toutes les femmes en pareilles rencontres.) L'Ogre craignant que sa femme ne fut trop longtemps a faire la besongne dont il l'avoit chargee, monta en haut pour luy aider. Il ne fut pas moins estonne que sa femme lors qu'il vit cet affreux spectacle. Ah, qu'ay-je fait, s'ecria-t-il, ils me le payeront les malheureux, & tout a l'heure.
Il jetta aussi-tost une potee d'eau dans le nez de sa femme, & l'ayant fait revenir, donne-moy viste mes bottes de sept lieues, luy dit-il, afin que j'aille les attraper. Il se mit en campagne, & apres avoir couru bien loin de tous costes, enfin il entra dans le chemin ou marchoient ces pauvres enfans qui n'etoient plus qu'a cent pas du logis de leur pere. Ils virent l'Ogre qui alloit de montagne en montagne, & qui traversoit des rivieres aussi ais.e.m.e.nt qu'il auroit fait le moindre ruisseau. Le pet.i.t Poucet qui vit un Rocher creux proche le lieu ou ils estoient, y fit cacher ses six freres, & s'y fourra aussi, regardant toujours ce que l'Ogre deviendroit. L'Ogre qui se trouvoit fort las du long chemin qu'il avoit fait inutilement, (car les bottes de sept lieues fatiguent fort leur homme,) voulut se reposer, & par hazard il alla s'a.s.seoir sur la roche ou les pet.i.ts garcons s'estoient cachez. Comme il n'en pouvoit plus de fatigue, il s'endormit apres s'estre repose quelque temps; & vint a ronfler si effroyablement, que les pauvres enfans n'en eurent pas moins de peur, que quand il tenoit son grand Couteau pour leur couper la gorge. Le pet.i.t Poucet en eut moins de peur, & dit a ses freres de s'enfuir promptement a la maison, pendant que l'Ogre dormoit bien fort, & qu'ils ne se missent point en peine de luy. Ils crurent son conseil & gagnerent viste la maison. Le pet.i.t Poucet s'estant approche de l'Ogre, luy tira doucement ses bottes, & les mit aussi-tost; les bottes estoient fort grandes & fort larges; mais comme elles estoient Fees, elles avoient le don de s'agrandir & de s'appetisser selon la jambe de celuy qui les chaussoit, de sorte qu'elles se trouverent aussi justes a ses pieds & a ses jambes que si elles avoient este faites pour luy. Il alla droit a la maison de l'Ogre ou il trouva sa femme qui pleuroit aupres de ses filles egorgees. Vostre mari, luy dit le pet.i.t Poucet, est en grand danger, car il a este pris par une troupe de Voleurs qui out jure de le tuer s'il ne leur donne tout son or & tout son argent. Dans le moment qu'ils luy tenoient le poignard sur la gorge, il m'a aperceu & m'a prie de vous venir avertir de l'estat ou il est, & de vous dire de me donner tout ce qu'il a vaillant sans en rien retenir, parcequ'autrement ils le tueront sans misericorde: Comme la chose presse beaucoup, il a voulu que je prisse ses bottes de sept lieues que voila pour faire diligence, & aussi afin que vous ne croyez pas que je sois un affronteur. La bonne femme fort effrayee luy donna aussi-tost tout ce qu'elle avoit; car cet Ogre ne laissoit pas d'estre fort bon mari, quoy qu'il mangeast les pet.i.ts enfans. Le pet.i.t Poucet estant donc charge de toutes les richesses de l'Ogre s'en revint au logis de son pere, ou il fut receu avec bien de la joye.
Il y a bien des gens qui ne demeurent pas d'acord de cette derniere circonstance, & qui pretendent que le pet.i.t Poucet n'a jamais fait ce vol a l'Ogre; qu'a la verite, il n'avoit pas fait conscience de luy prendre ses bottes de sept lieues, parce qu'il ne s'en servoit que pour courir apres les pet.i.ts enfans. Ces gens-la a.s.seurent le scavoir de bonne part, & meme pour avoir bu & mange dans la maison du Bucheron. Ils a.s.surent que lorsque le pet.i.t Poucet eut chausse les bottes de l'Ogre, il s'en alla a la Cour, ou il scavoit qu'on estoit fort en peine d'une Armee, qui etoit a deux cens lieues de-la, & du succes d'une Bataille qu'on avoit donnee. Il alla, disent-ils, trouver le Roi, & luy dit que s'il le souhaitoit, il luy rapporteroit des nouvelles de l'Armee avant la fin du jour. Le Roi luy promit une grosse somme d'argent s'il en venoit a bout. Le pet.i.t Poucet rapporta des nouvelles des le soir meme, & cette premiere course l'ayant fait connoitre, il gagnoit tout ce qu'il vouloit; car le Roi le payoit parfaitement bien pour porter ses ordres a l'Armee, & une infinite de Dames luy donnoient tout ce qu'il vouloit pour avoir des nouvelles de leurs Amans, & ce fut la son plus grand gain. Il se trouvoit quelques femmes qui le chargeoient de Lettres pour leur maris, mais elles le payoient si mal, & cela alloit a si peu de chose, qu'il ne daignoit mettre en ligne de compte ce qu'il gagnoit de ce cote-la. Apres avoir fait pendant quelque temps le metier de courier, & y avoir ama.s.se beaucoup de bien, il revint chez son pere, ou il n'est pas possible d'imaginer la joye qu'on eut de le revoir. Il mit toute sa famille a son aise. Il achepta des Offices de nouvelle creation pour son pere & pour ses freres; & par la il les etablit tous, & fit parfaitement bien sa Cour en meme-temps.
MORALITe.
_On ne s'afflige point d'avoir beaucoup d'enfans, Quand ils sont tous beaux, bien-faits & bien grands, Et d'un exterieur qui brille; Mais si l'un d'eux est foible ou ne dit mot, On le meprise, on le raille, on le pille, Quelquefois cependant c'est ce pet.i.t marmot Qui fera le bonheur de toute la famille._
FIN.
_Extrait du Privilege du Roy._
Par Grace & Privilege du Roy, Donne a Fontainebleau, le 28. Octobre 1696. Signe LOUVET, & Scele: Il est permis au Sieur P. DARMANCOUR, de faire Imprimer par tel Imprimeur ou Libraire qu'il voudra choisir, un Livre qui a pour t.i.tre, _Histoires ou Contes du temps pa.s.se, avec des Moralites_; & ce pendant le temps & es.p.a.ce de six annees consecutives, avec defense a tous Imprimeurs & Libraires de Notre Royaume, ou autres: d'Imprimer ou faire imprimer, vendre & distribuer ledit Livre sans son consentement, ou de ceux qui auront droit de lui; pendant ledit temps, sur les peines portees plus au long par ledit Privilege: Et ledit Sieur P. Darmancour a cede son Privilege a Claude Barbin, pour en jouir par luy, suivant l'accord fait entr'eux.
_Registre sur le Livre de la Communaute des Imprimeurs & Libraires de Paris le 11. Janvier 1697._
Signe, P. AUBOUIN, Syndic.
Les Exemplaires ont este fournis.
CONTES
_EN VERS_
PAR MR. PERRAULT,
DE L'ACADEMIE FRANcOISE.
Popular Tales Part 11
You're reading novel Popular Tales Part 11 online at LightNovelFree.com. You can use the follow function to bookmark your favorite novel ( Only for registered users ). If you find any errors ( broken links, can't load photos, etc.. ), Please let us know so we can fix it as soon as possible. And when you start a conversation or debate about a certain topic with other people, please do not offend them just because you don't like their opinions.
Popular Tales Part 11 summary
You're reading Popular Tales Part 11. This novel has been translated by Updating. Author: Charles Perrault already has 925 views.
It's great if you read and follow any novel on our website. We promise you that we'll bring you the latest, hottest novel everyday and FREE.
LightNovelFree.com is a most smartest website for reading novel online, it can automatic resize images to fit your pc screen, even on your mobile. Experience now by using your smartphone and access to LightNovelFree.com
- Related chapter:
- Popular Tales Part 10
- Popular Tales Part 12